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UN AUTRE REGARD SUR MAI 68, EXPOSITION DE PHOTOGRAPHIES DE PHILIPPE GRAS

23 mai 2018 — 9 juin 2018
Moscou
UN AUTRE REGARD SUR MAI 68, EXPOSITION DE PHOTOGRAPHIES DE PHILIPPE GRAS
23 mai 2018 — 9 juin 2018
Moscou
Les photos de Philippe Gras, longtemps restées inédites, montrent vraiment une autre vision de Mai 68. Les images de l’époque les plus connues jusqu’à présent avaient une tonalité épique : des barricades, des lanceurs de pavés, une jeune femme belle comme la Liberté portant un drapeau sur les épaules d’un manifestant, Cohn-Bendit tout sourire défiant un policier… Il était sans doute nécessaire qu’un événement qui avait fait vaciller l’un des États les plus anciens d’Europe soit d’abord incarné par des photos épiques. Philippe Gras, lui, nous montre des rues presque désertes, des graffiti dans le métro, des gens qui ramassent des pavés loin des barricades, des manifestants fatigués qui s’endorment, des policiers qui font la queue pour recevoir leur casse-croûte. Il montre des flâneurs, ou un étudiant qui s’enfuit, qui sait pourquoi, devant un lointain cordon de policiers. Quiconque a participé à un mouvement de rue sait que c’est cela que vit la plupart des gens dans ce genre de situation. Et c’est pour cela, en dehors de son immense talent, de son goût pour le contraste, de son humour, que ces photos sont profondément émouvantes. Il est possible d’aller plus loin encore en disant que Philippe Gras est un photographe stendhalien. On se souvient de la phrase de Stendhal : « le roman est un miroir que l’on promène le long d’un chemin ». Les petits faits ont la même importance que les grands. Souvenez-vous du récit de Waterloo par Stendhal à travers les yeux de Fabrice del Dongo. Il ne voit la bataille que par une multitude de détails surgissant au hasard. Pour Philippe Gras aussi, c’est un choix éthique de prendre ce qui vient comme il vient, mais en l’attrapant au moment précis où il s’est le plus chargé de sens : cet homme en tenue bourgeoise qui alimente un feu de rue, cette jeune fille pensive qui vend un journal révolutionnaire, ces ouvriers en mobylette qui viennent au Quartier latin voir à quoi ressemble Mai 68… et puis soudainement, il y a en effet une photo épique, des manifestants qui grimpent sur le Lion de Belfort, formant une si parfaite pyramide que la photo semble posée comme celle des Marines hissant la bannière étoilée à Iwo Jima. Il y en a peut-être encore une autre, celle d’un lanceur de pavé, mais ce n’est qu’une petite ombre lointaine dans la nuit. Et Il y a une photo tragique, celle de la grande actrice Madeleine Renaud comparaissant devant la foule, humble dans son duffle-coat comme pour affronter un tribunal révolutionnaire, derrière un procureur s’adressant au public en une pose théâtrale. Et puis, heureusement, il y a une ou deux photos d’amoureux, car c’est cela aussi Mai 68. (D’après Dominique Beaux et François Nicoullaud) L'exposition se tiendra à l'Institut français. Entrée libre